Le futur sera-t-il kasha ?
Traditionnellement utilisé dans les pays de l’Est ou en Asie, le Kasha est une sorte de bouillie de sarrasin grillé. Mais le Kasha est surtout connu aujourd’hui sous forme de graines de sarrasin grillées. C’est une céréale très digeste qui comporte 10% de protéines, du cuivre, du magnésium, du manganèse, du phosphore, du zinc, du fer et c’est surtout pour les initiés et les intolérants, un produit sans gluten. Manon Le Bec est productrice de Kasha, une manière, pour elle de donner d’autres possibilités au fameux blé noir de sa Bretagne.
Qu’est ce que le Kasha ?
Manon Le Bec : C’est un sarrasin grillé et torréfié pas du tout consommé en Bretagne. Nous faisons du Sobacha une sorte de thé japonais au sarrasin. C’est du kasha infusé dans de l’eau bouillante. C’est une boisson très désaltérante et riche en oligoéléments. Le Kasha sert aussi à faire des gruaux (préparation de grain de céréales), des mélanges, peut être cuit à l’eau qui accompagne très bien les poissons ou les fruits de mer (comme les coquilles Saint-Jacques). On en saupoudre les salades ou les gratins pour apporter un peu de croustillant. La torréfaction du sarrasin lui donne un petit goût de noisette. La graine de sarrasin a une coque très dure mais sitôt qu’elle est décortiquée, elle devient très friable.
Qu’est ce qui vous a amené à vous lancer dans cette production ?
En tant que Bretonne, j’ai toujours pensé que le sarrasin était un produit purement de chez nous. En l’étudiant j’ai appris ses origines asiatiques. De plus je m’aperçois qu’en Bretagne il n’est utilisé que sous sa forme de farine ou éventuellement en bouillie dans le Finistère Nord. Mais jamais nous ne prenons le grain entier pour le décortiquer et le cuisiner. Je suis partie faire le tour des céréaliers breton en woofing* pour trouver du sarrasin décortiqué. Je n’ai rencontré qu’un seul producteur. J’ai donc décidé de le faire moi-même et de le partager avec les gens autour de moi. Nous connaissions le Kasha des pays de L’Est et je voulais faire déguster le Kasha breton. J’ai voulu faire un produit transformé à partir du sarrasin déjà torréfié. J’ai alors créé la marque « Holen ed du » (Sel blé noir).
Y’a-t-il une différence entre blé noir et sarrasin ?
Non, les bretons appellent le sarrasin, blé noir. L’avantage du sarrasin, c’est qu’il pousse sur des sols très arides et en Bretagne il s’est très bien adapté. Comment les bretons perçoivent ce kasha ? Ils adorent et les chefs sont très curieux de ses applications. Il y a beaucoup de manières d’utiliser cette céréale. Je fais, par exemple, des coussins avec le sarrasin. Je ne travaille qu’avec du sarrasin local. Ma démarche est aussi pédagogique. Je crée mon propre Kasha et le transforme. Je fais les marchés et les boutiques bio pour le faire connaître.
Ca veut dire que nous sommes en train de redécouvrir l’origine des produits ?
Nous revenons à une certaine simplicité car nous nous sommes aperçus que nous avions énormément transformé les produits au détriment de leurs qualités gustatives. Le blé d’antan a tellement été transformé qu’il n’est plus approprié à notre santé et que d’un aspect culinaire nous y avons beaucoup perdu. Nous rédécouvrons des céréales d’Afrique comme le Fonio ou d’autres comme le quinoa. Nous cherchons à retrouver une forme de pureté que l’Homme a perdu en jouant aux apprentis sorciers.
Pour vous, le Kasha entrera naturellement dans la cuisine de demain ?
Sans conteste, le sarrasin est un produit très moderne. Il va devenir incontournable car il est sans gluten et c’est une céréale qui cuit en très peu de temps (5 à 10 minutes à l’eau). Le sarrasin, transformé en Kasha, a un goût particulier qui n’est pas vraiment similaire à la farine de blé noir. Aujourd’hui, je livre essentiellement en Bretagne mais je vais m’étendre pour porter ailleurs les couleurs de ma région.
Interview réalisée par Florent Lamiaux
+ Renseignements : [email protected]
facebook : Manon ELBé healthy
* Woofing : Système d'organisation qui consiste à faire travailler bénévolement des personnes sur une exploitation agricole et biologique, en échange du gîte et du couvert.